le 30/06/2002

 
 
 
 
 
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     30/06/2002
     
 
 
 
 
 
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Images de l'Inde

Il y a 5 mois, nous arrivions à Bombay, la tête remplie d'images. Celles d'une Inde rêvée, imaginée, mythifiée. L'Inde des femmes aux saris multicolores, à la fois princesses et mendiantes. L'Inde aux couleurs chatoyantes et aux odeurs d'épices, l'Inde des vaches sacrées, celle de Gandhi et des maharadjas. "L'Inde c'est un peu comme un oignon" nous disait alors en préambule un jeune touriste canadien. "Tu le pelles et tu découvres qu'il y a toujours une couche en dessous." disait t-il pour expliquer la complexité du pays qu'il venait de découvrir.

Derrière les murs, c'est une autre Inde

L'Inde conjugue la magie et l'horreur, la beauté et la laideur. La pauvreté est omniprésente. Ce sont des mendiants, des infirmes qui exhibent malformations et maladies à l'entrée des temples ou des enfants qui jouent sur les tas d'ordures où viennent se nourrir les vaches sacrées. Les plus pauvres, hommes et femmes, quittent les campagnes et vont de villes en villes, de chantiers en chantiers pour de maigres salaires. Pour assurer un retour d'argent à la famille restée au village, ils dorment dehors. Sous une bâche de plastique, ils improvisent une tente sous laquelle ils couchent à plusieurs et prennent leur repas. Et pour se laver, ils vont à la pompe à eau la plus proche. A Delhi, ces miséreux dorment sous les fenêtres des villas gardées par des vigiles. Derrière les murs, c'est une autre Inde. Celle des classes aisées, qui fréquentent les supermarchés et parlent plus volontiers l'anglais que l'hindi. Les différences de castes, de karma semblent les rendre insensibles à cette misère toute proche.

Une paillasse dans la cour et une soupe de dal trois fois par jour

La misère des familles c'est aussi la misère des enfants. Déscolarisés, certains travaillent aux champs, dans les hôtels et les restaurants et dans les ateliers où sont fabriqués des objets artisanaux, ces mêmes objets vendus en France avec l'étiquette "fait à la main". Dans ce restaurant de Chennai, les employés en salle n'ont pas plus de 13 ans, et dans cet hôtel de Konark, Murga nous explique qu'il travaille depuis l'âge de 8 ans. "Ma famille n'avait pas assez d'argent pour nourrir mes 6 frères et sœurs." Alors il a été donné à cette famille d'hôteliers où il gagne pour son travail le gîte et le couvert. Une paillasse dans la cour et une soupe de dal trois fois par jour.

Les brahmanes et les saddhus sont incontournables

Partout l'emprise de la religion est très forte, et pour tous, elle explique beaucoup de choses. La création du monde et la place de chacun dans la société notamment… Quotidiennement, en témoignage de ferveur, les femmes collent sur leur front des pastilles de couleur et les hommes posent au même endroit des pigments de couleurs et des grains de riz. Dans les temples, les statues des divinités sont couvertes d'offrandes et de fleurs et les plus anciennes statues ont désormais perdu leurs traits et leur formes que les caresses des fidèles ont effacé.

Les brahmanes et les saddhus sont incontournables. Pour se marier, monter une affaire, ils sont là, prodiguant leurs conseils. Surya n'a que 14 ans, mais selon le guru familial, elle doit jeûner tous les mercredis pour réussir sa scolarité. Et pour Prassanna qui a ouvert une boutique à Udaipur, les 3 bagues qu'il porte aux doigts lui apportent chance, fortune et maîtrise de soi. Son guru lui a aussi prescrit le jeûne une fois par semaine. Ce dernier encore donnera un avis définitif sur le futur mariage de son fils.

Et sur les routes, les automobilistes et les chauffeurs routiers roulent sans respect des règles de bon sens. Porte-bonheur et bagues magiques les protègent d'éventuels accidents. Rouler sur les routes indiennes est une épreuve où l'on se demande toujours si on arrivera à destination.

Pour les hindous, nous sommes restés des intouchables

Est ce la religion encore qui explique le peu de rencontres que nous avons faites parmi les hindous? Dans les pays arabes, les musulmans nous accueillaient comme des amis "Tu es ici chez toi, ma maison est la tienne." nous disait notre ami Mohammed en Jordanie. En Inde, sikh, musulmans et bouddhistes nous ont accueilli avec la même bienveillance, la même spontanéité, nous ouvrant les portes de leurs maisons. Mais pour les hindous, nous sommes restés des intouchables, des extra-terrestres, des bêtes curieuses que l'on scrute et observe. Dans quelques jours, nous quitterons l'Inde. Et c'est avec une certaine impatience que nous attendons ce départ car depuis plusieurs semaines, nous nous sentons fatigués et lassés par l'attitude des indiens à notre égard. Direction la Malaisie où nous espérons retrouver un peu de contact et de chaleur humaine.

Nani et Minh