le 22/04/2002

 
 
 
 
 
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     22/04/2002
     
     
     
     
 
 
 
 
 
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La chasse aux roupies

Il est 2 heures de l'après-midi et il fait au moins 40 degrés à l'ombre. Dans le centre-ville de Lucknow, la circulation bat son plein. Dans le désordre et la cohue, des voitures, des rickshaws, des vélos, des piétons essaient de se frayer un passage.

Près d'un rond point, un agent de police fatigué par la chaleur semble faire peu de cas du trafic qu'il est censé réguler. Pas de chance, il nous a repéré. Il s'agite, nous fait signe. Coup de sifflet.
- Où allez vous? Les papiers du véhicule?
Il prend quelques minutes à inspecter le carnet de passage en douane, l'assurance de la voiture, le permis de conduire sans bien comprendre ce dont il s'agit, puis se tourne vers nous.
- Vous me devez 200 roupies.
- 200 roupies ! Et pourquoi donc ? C'est hors de question !
Il réfléchit, regarde son collègue, comme s'il attendait qu'il lui souffle une réplique pertinente, mais ce dernier reste muet.
- Ok, vous pouvez y aller...

Scène de notre vie quotidienne en Inde. La chasse aux roupies est une occupation et une préoccupation quotidienne pour bon nombre d'indiens. Le niveau de vie du pays est très faible et le touriste est souvent considéré comme une mine à roupies, qu'on travaille au corps pour le délester d'un peu d'argent. C'est une proie facile pour les fonctionnaires, policiers, chauffeurs de taxis, marchands ambulants ...

Mais non, c'est 22 roupies. C'est marqué sur le paquet : "22 roupies toutes taxes incluses"

Même un acte aussi banal qu'acheter des cigarettes peut prendre un certain temps.
- Namasté. Un paquet de cigarettes, s'il vous plaît.
- 33 roupies.
- Mais non, c'est 22 roupies. C'est marqué sur le paquet : "22 roupies toutes taxes incluses" !
- C'est 33 roupies.
- Mais non ! Pourquoi ?
- 33 roupies en comptant les taxes spéciales.
Bien sur, les taxes spéciales touristes ! Tant pis, il nous faut trouver un marchand qui acceptera de nous les vendre au juste prix.

Garer la voiture sur un parking demande parfois les mêmes efforts de patience et de persuasion.
- 10 roupies de l'heure, monsieur.
- C'est un peu cher. D'habitude, on paie 5 roupies. Pourquoi c'est 10 roupies ici?
- C'est le même prix pour tout le monde, monsieur.
Au moment de payer, il nous tend un ticket. Le prix est indiqué dessus.
- Il est inscrit 5 roupies sur votre ticket !
- D'accord, d'accord. 5 roupies.

Et les mêmes scènes se répètent chaque jour. Une course en taxi en milieu d'après-midi et le chauffeur met en marche le tarif de nuit. Sur les marchés, les prix du kilo de bananes, de tomates, de pommes de terre passent brusquement à la hausse à notre arrivée. Et dans ce pays minée par une bureaucratie excessive, un coup de tampon et une signature sont un prétexte suffisant pour exiger un bakchich de plusieurs centaines de roupies...

Amusement, irritation, colère, compréhension...

Amusement, irritation, colère, compréhension... Nos sentiments varient face à ses situations. Amusement parce qu'à l'usage, l'attitude des indiens à notre égard est prévisible. Irritation car ces situations altèrent les rapports humains et nous invitent malheureusement à la méfiance. Colère parce qu'il suffit dans certains moment d'élever un peu la voix pour avoir gain de cause. Compréhension aussi parce que dans ce pays, qui compte un quart des miséreux de la planète, quelques roupies gagnées sur le dos d'un touriste, c'est un peu plus d'argent pour nourrir la famille, et c'est finalement bien peu pour nous.

Nani et Minh